Mercredi 26 septembre, j’ai rendez-vous à 17 heures devant l’église San Zaccharia à Venise avec Patrizia.
Je ne sais pas grand chose d’elle, à part que c’est une vénitienne born and raised, ou, comme on dit ici, DOC : d’origine contrôlée. Une vraie locale qui m’accueillera ce soir chez elle, dans son appartement niché quelque part dans le Sestiere di San Marco.
En réalité, c’est son mari, Adriano, qui m’attend et me guide dans les ruelles jusqu’à leur maison, « un immeuble du XIIe siècle, les murs sont d’époque ».
En effet, la petite cour respire l’histoire. Nous grimpons jusqu’au dernier étage et je me retrouve sous les toits, dans un immense loft de 150 m² où m’attend Patrizia.
Patrizia est une Cesarina. C’est-à-dire une experte de la convivialité, une spécialiste de la cuisine maison, une professionnelle de la gastronomie locale.
Ce soir, elle va m’enseigner quelques recettes de cicchetti. J’ai hâte d’en savoir plus !
Mais d’abord, nous faisons le tour du propriétaire. Patrizia me montre leur vaste salon, la chambre, et surtout sa terrasse. L’appartement est doté d’une altana, une terrasse en bois que les vénitiens construisent sur les toits.
De là, le Campanile, les coupoles de Saint Marc et les clochers des églises de Venise s’étalent à perte de vue. J’aperçois même le Palais des Doges et les pointes de l’église de Santi Giovanni e Paolo.
Les cicchetti : c’est quoi ?
Commençons par la prononciation : on dit « Tchikéti ». Le « ch » en italien est l’équivalent du « qu » français.
D’ailleurs, vous êtes en train de lire un blog qui s’appelle l’occhio di lucie, à prononcer « oKKio di lucie » (je sais que plein de gens se demandent comment ça se prononce, j’en profite).
Donc, les Tchikéti. Dans les bars, à Venise, qu’on appelle des « bacari », vous les verrez derrière le comptoir. Petites portions de nourriture, on les commande avec son verre de vin, son prosecco ou son Spritz.
A Venise, les cicchetti les plus classiques sont souvent associés à un lieu, réputé comme le meilleur. Par exemple, si je veux manger des boulettes de viande, pour moi, c’est à la Vedova ou Ai Promessi Sposi. Pas ailleurs.
Pour en savoir plus sur mes adresses favorites pour manger des cicchetti, vous pouvez lire mon article et télécharger la Minimap que j’ai réalisée avec l’artiste Marc Combas.
Les cicchetti de Patrizia
Il y a BEAUCOUP de cicchetti différents. D’ailleurs, ce sont parfois des recettes accommodées selon la saison, le poisson qu’on trouve au marché ou les légumes qu’on a en réserve. Il y a des classiques, le reste appartient à la fantaisie de chacun. Patrizia a donc sélectionné quelques uns de ses ciccheti préférés pour m’en donner la recette.
Le plus classique : la Bruschetta
Attention, comment prononce-t-on le mot « bruschetta » ? Si vous avez bien lu, vous devriez le savoir. Sinon, la réponse est « brOUsKetta », j’aime bien ce mot, il est rigolo.
Vous pensez que la bruschetta est simple à préparer ? Vous avez raison.
Vous croyez que c’est évident à faire ? Vous vous trompez.
Comme souvent en cuisine italienne, simplicité et détails soignés vont de pair.
Pour faire une bruschetta impeccable, voilà comment procéder :
- Prenez des tomates de saison (sinon c’est pas la peine d’en parler).
- Coupez ces tomates en tout petits dés. Ils doivent être vraiment petits, quasi hachés.
- Ajoutez du basilic frais à peine taillé, de l’huile d’olive, de l’ail haché, du sel et laissez reposer dans un bol.
- Au dernier moment, sur une tranche de pain grillée encore chaude, servez la préparation.
Le secret de la saveur, c’est le temps de repos pendant lequel la tomate, l’ail, l’huile et le basilic infusent ensemble.
La plus vénitienne : le baccalà mantecato
Crémeux, blanc, doux et fort en goût, j’aime le baccalà mantecato à Venise. Dans les bacari, on le trouve sur une tranche de pain ou de polenta encore chaude. C’est un délice rassurant, à manger toute l’année, un vrai symbole de la gastronomie vénitienne.
J’avais hâte d’apprendre à le préparer, et j’ai découvert que c’est extrêmement simple.
Il faut :
- Un morceau de baccalà salé. On le plonge dans l’eau bouillante quelques minutes seulement.
- Un mixeur. On y met le baccalà, de l’ail, un peu d’huile d’olive, une goutte de lait, et on fait monter.
- C’est tout.
Le truc, c’est de bien faire le mouvement de haut en bas et d’introduire de l’air pour faire monter la préparation.
Patrizia me raconte qu’avant le mixeur électrique, on utilisait une grosse marmite que l’on battait par terre dans les cours de Venise. Ça devait faire un sacré boucan.
Le uove lavorate
Les oeufs durs sont aussi très présents sur les comptoirs des bars de Venise. La façon de les préparer change au cours des saisons : avec un anchois, une asperge, une tranche de saumon… Patrizia me propose aujourd’hui de tester les uova lavorate, les « oeufs travaillés »
Encore une recette très simple :
- Prenez des œufs durs, coupez les en deux.
- Écrasez les jaunes et mélangez les à de la mayonnaise (maison, c’est mieux ;))
- Ajoutez du thon en filets que vous émiettez (en Italie, on en trouve de bonne qualité dans des bocaux en verre au supermarché)
- Replacez le mélange à la place du jaune
C’est tout 🙂
Cocktail di Gamberetti
Encore plus simple, un petit ciccheto qui convient aussi très bien comme antipasto. Simplement, les crevettes, bouillies et nettoyées, sont associées aux tomates (toujours de saison) puis servies en sauce rose, un peu de mayonnaise au coulis de tomates.
Le truc en plus de Patrizia, c’est la présentation, qu’elle s’applique à faire dans des coquilles Saint Jacques.
A table ! Pendant le repas, Adriano, Patrizia et moi discutons, ils me racontent Venise, leurs voyages, leurs expériences. Le tout, en buvant à volonté un vin local, lui aussi produit à San Erasmo et au goût légèrement iodé. Car comme on dit à Venise « L’acqua fa marcire i pai », « l’eau, ça fait pourrir les pilotis ! »
Un proverbe local dans une région où on aime bien lever le coude 🙂
Les avantages de l’atelier cuisine « Cicchetti Veneziani » avec les Cesarine :
- Une expérience chez l’habitant, une vraie rencontre
- La possibilité de cuisiner des produits locaux
- Une attention à la qualité
- Dans le cas des ciccheti, un atelier vraiment facile et accessible à tous, quel que soit votre expérience en cuisine.
Une seule petite déception : j’ai trouvé l’atelier un peu trop facile. C’est vrai que j’adore cuisiner donc j’ai l’habitude de mettre les mains à la pâte. Peut être qu’un atelier de préparation complète d’un repas m’aurait mieux convenu, mais j’étais vraiment ravie d’apprendre à faire le baccalà mantecato ! C’est sûr, je le mettrai désormais au menu à la maison.
Pour écrire cet article, j’ai été invitée à tester l’expérience par les Cesarine. Ce réseau permet d’aller manger chez l’habitant un peu partout en Italie, en prenant un cours de cuisine avant le repas ou en mettant directement les pieds sous la table.
J’ai trouvé l’idée géniale. Quand on se promène dans les rues des villages d’Italie, surtout le dimanche, les rues embaument les parfums des sauces, du basilic ou du four chaud. Souvent, je rêve de toquer à la porte et de me faire inviter, tant les odeurs de cuisine sont affolantes. Les Cesarine facilitent cette rencontre en vous proposant d’acheter une expérience de repas chez l’habitant et avec l’habitant. La convivialité de la table privée, les saveurs de la gastronomie faite maison, et le plaisir de la rencontre.
Si vous voulez en savoir plus, je vous laisse consulter le site des Cesarine.
Merci à elles pour l’invitation !
Je vous prévois d’ailleurs un article recette spécial fête des morts, avec une recette glauque à souhait. Affaire à suivre…
Perfetto !
Grazie
Prego 🙂
Il n’est pas trop salé ton baccalà mantecato? Quand ma grand-maman le prépare c’est toujours le rambdam de combat. Il faut le laisser dessaler des heures, le cuire encore et encore. Du coup, elle n’en fait presque jamais. Je suis subjuguée, je vais tenter la recette. J’ai dû sourire avec ton « sauce rose » que j’ai dû me reprendre à deux fois car j’avais lu salsa rosa sans réfléchir.
Alors elle avait préparé le poisson à l’avance donc je n’ai pas vu le processus pour le dessaler. Il n’était pas trop salé non, vraiment pas du tout ! Elle m’a dit qu’il fallait le mettre seulement quelques secondes dans l’eau bouillante. Peut être que la phase de dessalage, quand on laisse tremper la morue, doit être longue.
Et sauce rose ou salsa rosa, en fait, je ne sais pas comment on l’appelle en français ? :O
Hello! Merci pour cet article ! Petites questions : les cours sont disponibles en quelle langue ? Je ne parle pas italien…
Quel est le prix pour un cours?
Merci pour cette découverte en tout cas!!! Je pense tester la prochaine fois que je vais en Italie..!
Bonjour Flore ! Il y a des Cesarine qui parlent l’anglais, d’autres, comme Patrizia parlent français. Parfois elles font venir un traducteur 🙂
Côté prix, ça dépend de l’expérience. Pour une dîner simple (sans le cours) les prix commencent à 45€, pour un cours de cuisine tout dépend de ce que tu vas préparer. J’espère que tu auras l’occasion d’essayer 😀
Merci !!
Bonjour Lucie,
Je viens de réserver avec Patricia pour un cours de cichetti au mois d’août. Hâte de faire de la cuisine. Je te dirais comment cela s’est déroulé.
Merci pour tes conseils avisés et ton œil de lynx !
Merci Anne, et bon cours !