Mon endroit préféré #HistoiresExpatriées

Mon endroit préféré #HistoiresExpatriées

Pour le rendez-vous de septembre d’#HistoiresExpatriées, le thème soufflé par Sophie du blog Au Sud du Pôle Nord est : « Mon endroit préféré ». Je me suis laissée inspirer pour un texte un peu plus narratif que d’habitude, j’espère que vous l’apprécierez. Il y en a plus à lire, mais ne vous découragez pas : à la fin de l’article, j’annonce une petite surprise, et il y a des cadeaux 😉

Bonne lecture !


mon endroit préféré

Mon endroit préféré.

Sur la voute en ciment irrégulier, la lumière dégrade sa palette en clair obscur, souligne les cratères. Dehors, le blanc est éblouissant, dedans, l’odeur humide, le sol frais, la poussière partout. Il y a le bruit des vagues et le silence du reste. Je me lève, en quelques pas je suis dehors, sur le parvis, de ciment encore. Sur un carton, slip et baskets, il y a Paolo qui dort. Diogène au cœur triste, il pense à Pamela, qui lui a promis qu’elle reviendrait. Le sentier est désert, l’air chaud, il est onze heures. La plupart des grottini sont fermés. Sur l’eau, une barque pêche : c’est le couple de la grotte d’à côté. Je mets mes chaussures et je rejoins les autres.

mon endroit préféré

La pêche aux moules.

Notre matériel est prêt. Une bouée, un morceau de filet trouvé sur la grève, un râteau rouillé qui traînait au fond de la grotte, des masques en plastique. Les rochers au large sont couverts de moscioli : c’est comme ça qu’ici, ils appellent les moules. Il faut vite se jeter entre les rochers glissants et tirer sur ses bras en longues brasses. Sur la barque, le couple fait de grands gestes pour nous indiquer la direction des meilleurs coins. Nous plongeons et au milieu des bulles et des algues elles apparaissent en grappes noires. Souples et rapides, nous remplissons les filets. De temps à autre, nous faisons une pause, pour contempler la pêche. On en prend encore ? C’est l’estomac qui répond, pensant déjà au goût des spaghettis aux moules. Encore.

visiter ancone

Pamela.

Puis nous voilà sur la jetée de ciment, un long filet cylindrique emprisonnant notre pêche. A deux, chacun prend une extrémité, on tire et on pousse, dans un fracas de coquilles, pour les débarrasser des débris de la mer. Paolo vient vers nous, l’ombre de la montagne l’a recouvert et tiré de son sommeil. Pamela n’est pas là, tu crois qu’elle viendra ? Il n’est que midi, si elle venait, ah, les longs repas devant la grotte, ah, les bières qu’on partagerait, les joints qu’elle fumerait face aux étoiles, et la nuit qui s’étirerait, l’aube à regarder ensemble, pourquoi elle ne vient pas ? Pamela est une vraie connasse, mais Paolo ne le dit pas. Pamela vient, mange, boit, rit, se baigne, t’aime puis s’en va. Elle ne revient pas. Ou alors quand tu ne l’attends pas. C’est qu’elle pourrait arriver n’importe quand. Maintenant, demain, ce soir, jamais ou dans trois ans. Paolo descend le long du sentier jusqu’à la grotte et remonte quand il n’a plus d’espoir, quand il se fait trop chier ou quand il se dit que Pamela n’en vaut pas la peine. Paolo raconte et nous passons aux couteaux, pour nettoyer les coquilles brillantes.

Grottini.

C’est l’heure du repos, de la lecture et des rêveries. J’aime penser en marchant, alors je pars explorer la côte. Quelques grottes se sont ouvertes, devant leurs portails colorés béants, des couples jouent au cartes, des femmes en sortent, un transat sous le bras. Ici, les grottes sont sauvages, elles ont peu changé depuis que les pêcheurs du Conero, on ne sait plus bien quand, les ont creusées au pied de la montagne, face à la mer. Certains les utilisent encore pour ranger leur barque de bois ou leur kayak sur lequel ils filent dès l’aube le long de la côte. Pas d’électricité, juste l’eau courante, parfois une cuisinière à gaz. Je passe la ride du promontoire et retrouve le soleil. La roche change, plus blanche, elle glisse doucement vers la mer ou elle forme des piscines aux eaux basses. Devant moi, les grottes deviennent palaces : un étage, plusieurs pièces, une jetée pour garer le Zodiac, et partout des gosses qui barbotent, courent, crient. Les grottini de Berlusconi, s’exclame mon ami, sarcastique.

Nuit.

Paolo n’a pas voulu rester, il a décliné notre invitation, rangé son carton dans sa grotte, abandonné ses baskets pourries et ses allures de clochard iodé pour repartir vers son appartement.
Notre grotte est nue. Elle n’a pas encore de meuble. Tout juste si nous en avons extrait les pierres et la poussière qui la remplissaient depuis 40 ans. Pourtant, avec son grand drap étendu sur le parvis, quelques bougies chauffe-plat et des assiettes en plastique face au ciel rose, elle a de l’allure, notre salle à manger. Spaghettis aux moules, pepatta di moscioli, nous vidons une à une les coquilles avant de les jeter à nouveau à l’eau, en un seul geste.
Il suffit de débarrasser et de retourner la nappe et la salle à manger devient chambre à coucher, sous un plafond d’étoiles à qui raconter des histoires. Demain, vers six heures, l’aube réveillera le ciel. Ses bâillements oranges et roses compenseront les nôtres.

Mon endroit préféré en Italie est une petite grotte au pied du Mont Conero. Il faut marcher 20 minutes sur un sentier raide pour y arriver, mais on y trouve de la menthe sauvage et des vues époustouflantes sur la côte. Mon endroit préféré est la grotte de mon ami Mimmo, une grotte qu’on lui a confiée contre rien d’autre que des bons soins. D’Ancone, part une ribambelle de grottini accessibles par escalier, ascenseur ou bateau, et aménagés en lieux de vacances où passer l’été. Mon ami, lui, jouit du calme des lieux peu accessibles. J’aime cet endroit, il suffit de le regarder et dans ma tête s’écrivent des histoires. Il n’y a pas que le bleu de la mer, le blanc de la pierre calcaire qui s’effrite dans l’eau et la splendeur des ciels, le soir et le matin. J’aime cet endroit parce qu’il me raconte quelque chose. Le cœur de pierre du Monte Conero est rempli d’histoires, et la grotte est l’endroit parfait pour écouter. Creusée dans la montagne, elle est l’écho de la mer et de la terre. Ce que je ne peux pas entendre, je l’invente : c’est mon dialogue avec mon endroit préféré.

Et si c’était ça, l’expatriation ? Apprendre un pays pour écouter ses histoires. Devenir sensible à sa langue, savoir l’entendre partout à la fois. Les gens parlent, les paysages racontent.


Encore une fois, les #HistoiresExpatriées me surprennent. A chaque thème proposé, je me dis que je n’arriverai pas à écrire, et je dépasse les 1000 mots. Je lis les articles des autres, et je m’émerveille encore de la diversité de nos expériences et de nos récits.

Parce que je me régale à animer ce RDV, à écrire et à lire les participations, j’ai eu envie de faire plaisir aux participants et aux lecteurs et lectrices qui suivent ces articles, en organisant un concours.

J’ai contacté un éditeur qui, avec ses livres, raconte aussi les ailleurs. Je l’ai choisi après avoir lu quelques volumes qui m’ont beaucoup plu.

Je n’ai rien demandé d’autre que des livres à vous offrir, bien sûr, je ne suis pas payée. Par transparence, je préfère toujours le préciser.

Photo de la collection L’Âme des Peuples via la page instagram de la librairie La Nuit des Temps, à Rennes

L’Âme des peuples est une collection de la maison d’édition Nevicata qui propose une introduction à la culture d’un pays ou d’une ville. Dans un texte bref et très pertinent (du moins dans ceux que j’ai pu lire sur l’Italie), un expert présente un pays et sa culture.

« Parce que pour connaître les peuples, il faut d’abord les comprendre. »

Cinq exemplaires à gagner, 5 gagnant.es qui pourront choisir le titre de leur choix dans la collection.

Le concours à lieu sur Facebook, il faut avoir un compte pour participer.

Pour jouer, voici la marche à suivre :

  • Se rendre sur Facebook en suivant ce lien
  • Vous arrivez sur une publication de la page Histoires Expatriées, c’est ici uniquement que les participations seront prises en compte
  • Commenter la publication en nous disant quel pays vous aimeriez mieux comprendre/connaître
  • Bonus : vous pouvez suivre la page de l’Âme des Peuples et celle d’Histoires Expatriées et partager la publication afin que vos amis puissent participer 😉
  • Vous avez jusqu’au 25 septembre ! Bonne chance, et j’espère que ce concours vous plaira, que vous connaissiez la collection ou non 🙂
    Attention, les lots seront envoyés en France uniquement.

Merci à tous de suivre depuis presque un an les Histoires Expatriées !

12 thoughts on “Mon endroit préféré #HistoiresExpatriées”

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