En photo : un site archéologique sarde visité pour mon travail, lors de la canicule de l’année 2022.
Ces dernières semaines, l’Italie est frappée par « une vague de chaleur infernale » comme la désignent les médias. L’expression « caldo africano » (chaleur africaine), habituellement de tous les gros titres lors des canicules estivales, ne suffit plus. 43° à Rome, 47° en Sardaigne, on y est : c’est l’enfer.
L’Italie a de la fièvre
Les journaux, papier, télé ou radio, sont en boucle. Il fait chaud. Le nombre de villes marquées du « bollino rosso », la vignette rouge du ministère de la santé, ne cesse d’augmenter, et ça n’a rien à voir avec la politique.
La consommation d’électricité atteint des sommets, toutes les clims du pays tournent à fond. Dans les villes, l’effet canyon – quand les rayons du soleil se répercutent d’une façade à l’autre – est impitoyable.
À Naples, deux hommes sont morts, probablement de chaud, alors qu’ils jouaient au foot.
À Castelfranco Veneto, c’est un boulanger qui a fait un malaise, fatal.
Dans un entrepôt de Florence, un homme de 61 ans est mort alors que sa température avait atteint les 43°.
En Italie, on estime que 18.000 personnes sont mortes à cause de la chaleur en 2022. Combien seront-elles en 2023 ?
Touristes à tout prix
Alors même qu’on compte les victimes du caldo infernale, dans les rues de Rome, au Colisée, dans la Vallée des Temples d’Agrigente ou sur le site archéologique de Pompéi, les visites continuent, sans interruption sous un soleil de plomb.
Sur la place Saint-Pierre, qu’on voit en live ci-dessus, les visiteurs attendent de passer les contrôles de sécurité, formant une longue file en plein cagnard. Devant le Panthéon, récemment devenu payant, la queue s’étire sur le pavé bouillant. Alors que j’observe les principaux sites touristiques via webcam, j’ai l’impression d’assister à une représentation forcée d’un spectacle absurde.
Peu importe les conditions de travail des guides touristiques, agents de ménage ou de billetterie, la machine doit continuer de tourner. Mais est-il vraiment nécessaire de visiter des sites touristiques bouillants de chaleur lorsque le mercure dépasse les 35 ° ?
D’ailleurs, peut-on réellement tirer un bénéfice (de connaissance, d’enrichissement culturel) lorsqu’on passe son temps à s’éponger le front en cherchant l’ombre, errant entre un temple et une colonne sans plus trop comprendre où l’on est ?
Quand est-ce que ça s’arrête ?
Ces nuits d’insomnie, alors que la température dans mon appartement peine à descendre en dessous de 30, je me retourne dans mon lit, en me demandant combien de temps ça va durer. Les prévisions météo ne sont pas là pour me rassurer. L’été sera chaud.
Si les températures ne sont pas prêtes de baisser, il est temps de modifier nos habitudes.
En Italie, on parle déjà de chômage partiel pour certaines professions exposées à des températures ressenties dépassant les 35°. Les travailleurs de la culture, ou les archéologues, continuent pourtant à travailler sous des chaleurs extrêmes.
En Grèce, l’Acropole a fermé ses portes aux touristes durant les heures les plus chaudes.
Bien sûr, les touristes qui sont actuellement en Italie ont réservé leurs vacances bien avant de connaître la météo. Battant des records de fréquentation, Milan, Rome, Venise, Florence, toutes les villes reçoivent des flux de visiteurs de plus en plus importants.
Mais alors que les victimes de la chaleur s’annoncent déjà nombreuses, fermer les sites les plus chauds durant les heures où la température se fait extrême me semblerait logique. Si les événements climatiques extrêmes ne nous font pas ralentir le rythme, qu’est-ce qui pourra le faire ? Au lieu d’enchaîner les visites, en alternant avec des pauses dans des lieux surclimatisés, je vote pour la sieste, la lecture dans un jardin, le repos sur une plage, en attendant les heures – relativement – plus fraîches du soir pour profiter de promenades dans les centres historiques ou auprès des monuments.
Jusqu’à quand peut on continuer à faire comme si de rien n’était ?
Le problème est qu’il faut toujours 10 ans pour réagir au moindre petit problème…