2021 commence avec une bonne nouvelle : l’annonce du retour du train de nuit sur de nombreux tronçons européens. En réalité, cela fait quelques mois que les choses, doucement, commencent à bouger. Médias, blogs, les articles sur les plaisirs des voyages en train de nuit se multiplient. Libération en fait même sa Une, le 28 décembre, en embarquant sur l’une des deux lignes nocturnes encore ouvertes en France. Après avoir été considéré comme inconfortable et aliénant, il semblerait que le train de nuit soit prêt à faire son retour.
En effet, des lignes abandonnées, fermées aux voyageurs au profit des vols low-cost, pourraient bien reprendre du service en Europe, mais aussi en France.
On a ainsi pu lire que quatre compagnies, la SNCF 🇫🇷 , la Deutsche Bahn 🇩🇪 , l’ÖBB 🇦🇹 et les Chemins de Fer Fédéraux 🇨🇭 ont conclu un accord pour la mise en service de quatre lignes européennes.
Et l’Italie ?
Sur la carte des nouvelles lignes, les trajets des futures lignes dessinent la géographie d’une Europe traversée par un axe vertical concentrant la majorité des nœuds. De petites branches viennent relier Paris, Amsterdam ou Bruxelles. Mais aussi Rome et Milan, qui devraient intégrer la ligne pour Zurich en 2022. Sur la carte, l’Italie semble un peu isolée, un simple terminus pour les trains de nuit.
En réalité, l’Italie compte de nombreuses lignes nocturnes nationales, les Intercity Notte, qui permettent de traverser le pays du Nord au Sud. De Milan, à Lecce, de Trieste à Palerme, de Bolzano à Rome, avec sur le chemin une infinité d’arrêts dans de petites gares endormies. A droite, une carte réalisée par trainline montre les lignes d’Intercity Notte en Italie, un réseau dense, même s’il manque la Bolzano-Roma et que je ne suis pas certaine que le tronçon par Perugia soit encore actif.
En plus de la future Rome-Zurich, de nombreux trains internationaux partent de Venise, gérés par des compagnies privées ou par la Öbb. Paris, Vienne, Ljubljana, Munich… ceux et celles qui l’ont déjà fait le savent, l’arrivée à Venise en train est d’une grande poésie.
Les nouvelles lignes annoncées devraient donc s’insérer dans un réseau national dense et faciliter les déplacements en train, bonne nouvelle !
Ode au train de nuit
Il y a quelque chose de déconcertant quand on voyage en train de nuit. Quand est-ce que commencent les vacances ? Le jour du départ, ou celui de l’arrivée ? Suspendus dans cet entre-deux, le temps du voyage est celui du rêve.
Je me souviens d’un train de nuit pris à Milan, direction Catane. Nous nous étions perdus dans la gare, dans son ventre énorme grouillant de quais souterrains. Nous avions foncé pour ne pas le rater, on avait perdu les compotes dans la course, on était montés in-extremis. Le train avait démarré, lentement. Mais d’autres voyageurs encore arrivaient, trop tard ! Un petit groupe s’était mis à frapper sur les vitres du train « oh, oh, arrête toi ! Fermati! «
Et le train s’était arrêté. Quand on a dix-huit heures de voyage devant soi, on a le temps pour ceux qui sont arrivés 10 secondes trop tard.
Car le train de nuit, c’est un antidote à la vitesse. Comme s’il voulait préserver le sommeil des passagers, il file doucement sur les rails, berçant mollement les dormeurs à coups de longues freinées à l’approche des gares, dans lesquelles il s’arrête longuement. Cette respiration du train, quand les insomniaques et le personnel de bord se retrouvent sur le quai pour fumer une cigarette, imprègne les rêves. On ne dort jamais profondément dans le train de nuit, pour ne pas se priver de la sensation du voyage. Chaque réveil est une surprise.
On est où ? Bâillements. Difficile à dire. La masse noire d’une gare, la nuit, ressemble à n’importe quelle autre. Ce n’est que le matin que le paysage apparaît franchement. On a quitté le nord brumeux de l’Italie pour se réveiller dans le jour cru de la Sicile. Des Pouilles. De la Calabre. Par la fenêtre, les montagnes pelées, la mer étincelante. Quel autre moyen de transport nous offre le luxe de faire corps de cette façon avec le paysage ?
Paris-Venise le temps d’un rêve… de luxe
Ce paragraphe est une mise à jour ajoutée le 29/06/2021
Sur une note un peu moins positive, on a appris fin-juin que la compagnie Thello, qui assurait la liaison nocturne entre Paris et Venise, cessera son activité transfrontalière à partir du 1er juillet. Très populaire, mais complètement à l’arrêt depuis le début de la pandémie, le voyage qui permettait de fermer les yeux gare de Lyon pour les rouvrir face au Grand Canal manque déjà à de nombreux voyageurs et voyageuses. Pour vivre cette expérience merveilleuse (et bien moins nocive qu’une visite en avion), une alternative de luxe se dessine à l’horizon 2024. La compagnie Midnight Train, créée par le cofondateur de Kisskiss Bankbank Adrien Aumont, souhaite en effet lancer des « hôtels sur rails » entre Paris et l’Italie. Un positionnement de luxe qui laisse imaginer des tarifs autrement élevés que ceux de Thello, dont la gamme de prix commençait à 35€. Fini le train de nuit populaire, place à l’expérience de luxe pour les cadres de la start-up nation rangés en cabines privatives. Oui, c’est bien si les riches arrêtent de prendre l’avion pour de courtes distances, mais à condition que les trains de nuit pour tous et toutes continuent de rouler. Tout le monde n’a pas vocation à prendre le Simplon Express pour un rendez-vous professionnel ou un weekend entre amis.
Dans la première version de cet article, je concluais par ce paragraphe :
« En 2021, j’espère qu’on prendra le train de nuit, qu’on s’arrêtera pour prendre les voyageurs arrivés à peine trop tard, qu’on aura le temps de rêver suspendus entre deux gares, qu’on échangera des histoires dans des compartiments ou sur un quai, avec des inconnus. »
Nous étions en janvier, et l’année se présentais très incertaine. En juin, une chose est sûre, cette année, je ne me réveillerai pas dans la forêt de Fontainebleau, bien au chaud dans un train de nuit. Pour aller en France sans prendre l’avion, il ne reste que galères, changements, très longs trajets et tarifs prohibitifs.
Sur une note plus positive, les transports nationaux en Italie continuent de proposer de nombreux trains, de jour comme de nuit. Ces lignes m’ont inspiré un livre, qui sort le 15 septembre chez Hachette : L’Italie en train. J’ai construit 18 itinéraires pour prendre son temps à la découverte de toutes les régions de ce grand et beau pays qu’est l’Italie. J’espère qu’il vous plaira 🙂
Un magnifique souvenir pour moi…ma premiere fois a Venise…1996…depart Nice..train pour Venise en T2 comme l on disait a cette epoque..ns 2 ds une cabine…wc lavabo…bois exotique..pt dej servi en cabine et a 6h30 arrivee a Venise…whaou quelle merveille…un souvenir inoubliable…depuis on vient Venise toutes les annees 1 semaine en mar date de mon anniversairemais en avion…aeroport /Venise on a tout fait…vaporetto…car…bateau taxi…on change chaque fois…on s en lasse pas..merci pour votre blog
Je n’ai encore pas eu la chance de voyager de nuit mais j’ai hâte de l’expérimenter, en Italie ou sur ces nouvelles lignes européennes. L’idée de s’endormir dans un pays et de se réveiller dans un autre me fascine, en se laissant bercer par le rythme du train en plus… ça me tente vraiment !
Le seul petit bémol pour moi serait la frustration de traverser tant de paysages sans les voir (car il fait nuit)… car ce qui est quand même chouette dans l’expérience du train, c’est de pouvoir admirer le paysage !!
Merci pour cet article Lucie, ça me donne très envie de me faire un tour de l’Italie en train, je trouve que le réseau ferroviaire Italien est très pratique, dense et abordable !
Merci pour cet article qui me ravie. J’aime le train et l’Italie, le train en Italie reste un très bon moyen de transport abordable, voyageant en transport en commun je suis une grande consommatrice des lignes ferroviaires. Je ne connaissais pas tout le réseau de nuit et l’idée d’un Milan Catane me tente énormément. En train de nuit j’ai déjà expérimenté un Strasbourg-Venise (1998) et Paris-Vérone (2010).
Paris Bercy/Venise. Quelle belle arrivée avec la gare donnant sur le Grand Canal cela a plus d allure que l avion et cela économise une nuit d hotel
Je partage complètement votre amour des trains de nuit et j’ai été moi aussi très triste en apprenant l’arrêt du Thello que j’avais pris pour Venise mais aussi pour Naples… là je rentre de Venise à Paris en train malgré tout, départ 10h48 arrivée 23h avec changement à Milan (et petit retard lié à un sanglier…), c’est long certes mais ça reste jouable ! À l’aller j’avais fait une pause d’une nuit à Turin. Je pense qu’en deux jours c’est plus « confortable ». Mais vivement les nouveaux trains de nuit (pas trop chers j’espère) !