Sulmona, cachée entre les montagnes

Avec la neige qui est tombée ces derniers jours sur la France, mais aussi sur l’Italie, envahissant les réseaux sociaux, j’ai repensé à la dernière fois que je l’ai vue. C’était début septembre, une chute de neige avait blanchi dans la nuit les cimes de la Majella. J’étais à Sulmona, dans les Abruzzes, jolie ville dont je vous parle aujourd’hui.

Il était une fois, une petite ville au fond d’une vallée. Cachée au creux des montagnes, enveloppée de forêts, on y vit paisiblement, loin du bruit. Le train et les voitures restent à distance du centre, essentiellement piéton. Battant le pavé, on découvre un méli-mélo d’églises, de rues étroites, de petites comme d’énormes places, toujours sous le regard des cimes de la Majella et du Morrone, qui entourent la vallée.

Des ermites et des poètes

En remontant la rue principale, qui traverse Sulmona de part en part, on aperçoit son nom gravé au croisement des rues. Puis le voilà, Ovide, sur son piédestal, observe les passants qui marchent sur le corso à son nom. S’il pouvait guider les visiteurs qui abordent aujourd’hui sa ville natale, il leur parlerait peut-être encore des eaux glacées qui l’irriguent…  »

« Sulmo mihi patria est, gelidis uberrimus undis »

Si vos souvenirs latins sont aussi lointains que les miens, voici la traduction de ce vers d’Ovide « Sulmona est ma patrie, riche d’eaux glacées ». Pourtant, on aura beau tendre l’oreille, on n’entendra ni le son d’une rivière, ni le fracas d’un torrent. Plus loin, aqueduc médiéval aux arches majestueuses interrompt la succession des petits palazzi. Derrière, la Piazza Garibaldi, aux proportions généreuses, accueille le marché.

Délicieuse Sulmona

Épousant les formes de la place, les étals prennent place sous les arbres et près de la fontaine. Dans les allées, entre une bancarella de culottes et de collants bons marchés, on cherche l’or rose de Sulmona, produit précieux à rapporter à tout prix avec soi. Tressé, il embaume l’air d’un parfum qui ne trompe pas. C’est l’ail rose de Sulmona, un produit délicieux qui devient crémeux lorsqu’on le met au four, puissant et doux dans une sauce tomate. Depuis que j’ai terminé la tresse que j’avais ramenée, je trouve tous les autres ails tristes et presque insipides.

Ici, on aime bien présenter les produits puisqu’après l’ail tressé, on passe aux fleurs de confetti. Les « dragées », car c’est ainsi qu’on les appelle en Italie, sont une spécialité de Sulmona, qui en produit de toutes les couleurs. Montés sur des piques, les confetti deviennent des fleurs colorées, dont on fait de joyeux bouquets les jours de fête.

photos du marché (en haut à gauche et en haut à droite) Gabriella Clare Marino via Unsplash.

L’Abbazia del Morrone

Au delà des vieux murs de Sulmona, à la sortie de la ville, l’Abbaye du Morrone égraine les heures dans le silence de la campagne. C’est un vaste complexe, qu’on peut visiter en écoutant l’écho de ses propres pas résonner sur les murs : pas un chat à l’horizon, ni touriste, ni religieux. Rien que le chant des oiseaux et le bruissement des arbres.

On marche dans ses cloîtres, on arpente son petit musée installé dans des salles au goût baroque, avant de grimper plus haut, au dessus de l’abbaye. On arrive ainsi à l’ermitage de Sant’Onofrio al Morrone, qui contemple toute la vallée Peligna, où se développe Sulmona.

Remonter le temps

Avant de quitter Sulmona par la route ou grâce au train régional qui la connecte au reste du monde, on prend place à bord de la Centoporte. C’est ainsi que sont surnommés les vieux wagons du train historique qui part de Sulmona vers les hauts plateaux, tous les dimanches. Dans les années 20, le train ressemblait plus à une diligence qu’à nos convois modernes. Ainsi, au lieu d’utiliser une porte commune à tout le wagon, les passagers descendaient par une porte aménagée pour chaque « carré » de sièges, comme dans une diligence. Ces vieilles carrozze ferroviaires, auxquelles s’ajoutent des wagons de première classe datant des années 1940 – les corbellini – prennent encore le rail lors de virées sur les anciennes lignes désaffectées qui entourent Sulmona. Destination Campo di Giove, Pescocostanzo, Castel di Sangro, l’itinéraire change selon la saison. A chacun des arrêts, les commerçants des alentours accourent pour vendre leurs produits, conférant aux étapes des allures de foire. Dans une odeur de pizza frite et d’ail rose acheté dans les villages, le train continue sa route pour traverser les splendides paysages d’altitude.

Plus d’informations : le site de la transiberiana d’Italia (surnom donné au train par un journaliste coincé dans une tempête de neige à bord du train dans les années 80), qui gère le calendrier des départs du train. Indispensable de réserver longtemps à l’avance, car le train a beaucoup de succès.

Carnet d’adresses

Manger à Sulmona : Restaurant Buonvento

Connaissez-vous les arosticini, ces brochettes d’agneau qui sont le symbole des Abruzzes ? On en mange d’excellents, parfumés au romarin, dans ce restaurant de la Piazza Plebiscito. C’est aussi l’adresse que j’ai préférée à Sulmona pour boire un verre de vin, avec une super sélection d’étiquettes abruzzaises et de vins nature, bio ou conventionnels. On peut se contenter d’un verre au comptoir où s’asseoir en salle pour dîner, et sympathiser avec la clientèle, surtout composée de petits groupes d’amis.

Piazza Plebiscito, 21/22
+39 0864950010

Dormir à Sulmona : Albergo Stella

Dans une ruelle tranquille à deux pas de l’aqueduc et de la Piazza Garibaldi, ce petit hôtel familial fait face à l’église de San Francesco. Au rez-de-chaussée, se trouve le bar, ouvert à toute heure de la journée pour un café, un déjeuner sur le pouce ou un verre de vin et un dîner, le soir. Dans les étages, les chambres, spacieuses, modernes et confortables. C’est ici que j’ai dormi lors de mes deux séjours à Sulmona. On y arrive à pieds, ayant laissé sa voiture au parking de la piazza Garibaldi, ou, si on est en train, en demandant à se faire récupérer à la gare, qui est un peu excentrée (environ 20 minutes à pieds du centre).

J’ai aussi beaucoup apprécié la gentillesse du personnel de l’hôtel, disponible pour donner à leurs hôtes tous les conseils nécessaires pour visiter la ville et les alentours, ainsi que des adresses pour manger. Très sympa.

A partir de 50€ la chambre double usage simple et 80€ pour une chambre double.

Via Panfilo Mazara, 18
+39 086452653

J’en profite pour remercier Giuseppe qui m’a offert l’hébergement à l’Albergo Stella lors de mon deuxième séjour à Sulmona 🙂

Si cet article vous a donné envie de prolonger votre séjour en Abruzzes, j’ai aussi écrit deux articles randonnée, sur le Monte Marsicano et les Gorges de Celano.